La liturgie a trop souvent tendance à minorer un élément majeur, au centre du mystère de la résurrection : ce sont des femmes qui l’attestent et c’est à l’une d’entre elles d’abord, que le Christ confie le message de son identité divine et de la voie qui, pour notre salut, nous conduit vers le Père,  nous qui sommes ses sœurs et ses frères.

Qui est cette femme ? Et que nous dit l’échange entre elle et Jésus au sortir du tombeau ?

L’évangile de Jean nous présente Marie la Magdaléenne comme la première à qui Jésus ressuscité s’est adressé. Cette rencontre souvent étudiée, l’est cependant rarement pour établir une claire continuité entre le Jésus de l’histoire et le Christ de la foi. Or, ce que Marie va découvrir, ce qu’elle sera chargée de transmettre, c’est que celui dont elle a pleuré la mort est bien celui qui l’appelle par son nom ; mais tout en restant le même, il est devenu Tout Autre.

C’est une relation d’amour d’une fidélité absolue qui l’a conduite jusque là, et c’est la parole du Christ qui la convoque en l’appelant par son nom, qui la guide sur le chemin de la reconnaissance. Nous retrouvons, mais cette fois en plénitude, la démarche de foi effectuée auparavant par Marthe.

Le passage qui s’opère progressivement en Marie et qui la guide de l’amour humain à la clarté spirituelle explique l’envoi en mission dont le Christ la charge pour annoncer la Bonne Nouvelle. Car n’oublions pas ces versets  où le Ressuscité dit à la Magdaléenne : “Va trouver mes frères et dis leur : je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. Et Marie la Magdaléenne vient annonçant aux disciples : j’ai vu le Seigneur et il a dit...” (Jn 20, 17-18)

« La résurrection comprise comme élévation suscite un saut qualitatif, une nouvelle forme de communion avec Dieu[1] » dit Jean Zumstein. Marie s’en acquitte et son expression « j’ai vu le Seigneur » est typique d’une théophanie comme la transmettra Paul aux Corinthiens : « Ne suis-je pas apôtre? N’ai-je donc pas vu Jésus, notre Seigneur? » (1Co9,1).

Thomas d’Aquin dans son Commentaire sur l’Évangile de saint Jean [2] analyse la scène et reconnaît dans la dévotion de Marie, le signe de sa constance à laquelle fera écho l’injonction de Paul : « soyez fermes et inébranlables [3]». Thomas souligne la supériorité de cet amour sur celui des autres disciples en écrivant : « En effet, après le départ des disciples, un amour plus fort et plus fervent maintenait en ce lieu cette femme [4]». Et pourtant… à quelles femmes catholiques cette « apôtre des apôtres » a-t-elle transmis la charge qu’elle a reçue du Ressuscité ? Selon les lettres authentiques de Paul : à Prisca, peut-être à Phoébé… mais depuis… ?

Dans ce monde qui doute, qui désespère parfois, et où les relations amicales entre humains ne semblent plus une valeur vitale… Ne serait-il pas temps de partager entre toutes et tous cette mission de transmettre la joie de l’Évangile, sans en réserver le droit à quelques « mis à part », à quelques clercs, qui semblent trop isolés pour la porter là où elle est attendue ?

Que la lumière de Pâques nous donne à toutes et tous, la force et l’enthousiasme de nous impliquer dans ce partage de la Bonne Nouvelle.

Christ est ressuscité ! ALLELUIA

sylvaine Landrivon

 

[1] Jean Zumstein, l’évangile selon Saint Jean (13-21), Genève, Labor et fides, 2007, p.280.

[2] Thomas d’Aquin, Commentaire sur l’Évangile de saint Jean, II,

[3] 1Co 15,28.

[4] Thomas d’Aquin, Commentaire sur l’Évangile de saint Jean, II, § 2491, p. 415.

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